jeudi 24 février 2011

Chandelles sans dessin

Elle sort ses mots vulgaires,

Pis elle sort ses allumettes
Elle se mets dans sa petite cachette
Elle dit : Bonne nuit petites misères.
Et elle mange ses chandelles en dessert.

dimanche 6 février 2011

Les Fourchettes dans le tiroir



Et voilà une première sur mon blog ! Une compo ! :-)

Dans ma cuisine
Y'a des assiettes qui s'bécottent
Maman Cuillère
Embrasse ses cuillères à thé

C'est la routine
Les tâches sont déjà prises en note
Et comme hier
Les gens sont tous pressés

Mais où sont les fourchettes
Tout le monde le sait
Mais personnes veut en parler
Elles se cachent dedans les tiroirs
Elles s'donnent des becs dans le noir

Maman t'en parle pas
Papa aime mieux pas y penser
Mais t'en fait pas
On en voit à peine à la télé

On s'ferme les yeux
Quand on en voit dans la rue
On est vieux jeux
Mais c'est finit on n'en parle plus

V'là les cousines
Spatule, louche et l'ouvre boîte
Elles font de l'oeil
À Monsieur le couteau

Spatule essaie d'avoir l'air fine
La louche est un peu maladroite
L'ouvre boîte et son orgeuil
''Ah c'qu'il est beau Monsieur couteau''

Mais où est la Cuillère en bois?
Encore une fois
On préfère s'abstenir
Yé dans l'chaudron, vaut mieux pas le déranger
Yé avec la jeune cuillère à thé

Clone

On se mange des peanuts
Pis on se boit du jus d'orange.
Pis on fait rien.

Main droite sur main gauche.
On se colle su' Mario²
Mario³ pisse.
Le reste, on s'en criss.

samedi 5 février 2011

Le Lac St-Jacques

Après le travail, je prenais mes tranches de pains de leur sac et j’allais au lac St-Jacques. Je m’assoyais sur un banc et je regardais le bleu. Je lui lançais des miettes et les canards approchaient. Les becs en nez de fouine, Martine apparaissait. Puis, Jean-Marc, Lucie et Jacob. Les petits apparaissaient quelques fois, mais pas ce matin, ce sera pour une autre fois.

Et sans plus, plus une tranche, j’attendais. Une main sur l’autre, je regardais les canards partir, un par un, vers d’autres visiteurs.

Et sans plus, plus une tranche, je repartais à la maison. Un pied devant l’autre, et l’un derrière naturellement, jusqu’au pied de ma porte et jusqu’à celui de mon lit.

Avant le travail, je m’achetais du pain.

Et je pensais à Martine qui surgissait. Comment allait Jean-Marc. Je crois que Lucie l’aime bien, même si Jacob aime Lucie. Et les petits à Martine. Je laisse des soupirs rêveurs. Les canards…

Après le travail, je prenais mes tranches de pains et Paul m’interpellait, mais je l’ignorais. Et je repartais pour le lac St-Jacques.

Un pas devant l’autre, le pied de mon lit que j’appelais Romain. Car je ne connaissais personne de ce nom et car j’aimais à dire que je dormais auprès de lui.

Le pain, le travail, Paul, les canards. Les pieds. Romain et Suzie l’allumette qui enflammait Benoit la bougie. Je me lavais aux bras d’Océane dans la cabine de Maxim, me frottait la peau de la douceur de Rose. Et je mangeais aux mains des assiettes. Jean-Patrick la soucoupe, Fragilité la cuillère. Jean-Pierre à soupe et Suzette à thé.

Paul m’interpellait, mais je l’ignorais. Une main sur l’autre, Frank et Françoise, j’attendais. Coco devant Coquette. Au pied de ma porte. Et Suzie l’allumait. Je les regardais se bécoter. Tout comme Frank et Françoise. Au berceau de leurs creux et au coin-coin de mon lit. Paul m’interpellait, mais je l’ignorais. J’attendais le silence.

Le reste, ça’m fatiguait.

mardi 11 janvier 2011

La mer calme

C’était grand, immense. L’extrémité était à la perte de la vue. Simplement car elle était trop loin. Le bleu et le calme, l’infinie douceur qui frappe mon ventre comme une tornade de soie. La légèreté de l’être, que j’enferme dans un coquillage, et j’écoute la mer. L’as-tu entendu ? Elle chantait notre mélodie.

« Lève-toi ! s’écriait soudainement Conscience Cupidon, me réveillant de mes rêveries. Ta dulcinée t’attend ! »

Je fermai aussitôt les yeux sous les couvertures, sous les draps, à essayer de me fondre sous le matelas même. Je disparaissais dans la mer à drap, sous ces eaux calmes à dormir. Je me berçai les paupières au rythme de ses vers, au sang de ses syncopes régulières. Je dormais dans son berceau d’algue et j’apercevais le monde, une particule de monde. Loin, loin, loin…

« Tu me f’ras pas honte de même toé ! me hurlait Conscience Maman. Lève toé sacrament ! »

Je retenais mon souffle.
« Fichez-moi le camp ! »
Je chassais les nuages pour n’avoir que le bleu. Que le bleu en tête, le ciel et la mer, le froid et les joues en hiver. Je retenais l’air jusqu’à ce qui ne reste que de bleu au monde et que de moi de vivant. La tête sous les couvertures, je regardais la mer et je respirais ce que je pouvais avant la marche. Conscience Cupidon me chaussa les pieds et m’habilla de mon veston-cravate. Je voulais dire non, mais je crois que j’ai dit oui.
Alors, les yeux à demi-clos je marchai sur la mer. Il y avait des boules blanches qui flottaient et qui roulaient sur la surface. Des algues en profondeur me chatouillaient les pieds. En habits noirs, des dauphins s’approchèrent de moi :

« Elle était si jolie. Elle va nous manquer » disait l’un.

« Je suis certain qu’elle nous regardera d’où elle sera » disait l’autre.

Les paroles des dauphins me paraissaient étranges dans un tel contexte. Pourquoi se convainquaient-ils de ses obscénités qu’on disait aux enfants pour les consoler ? Ces miracles étaient si lourds à penser, l’éternel me fatiguait et j’entendais un enfant tortue demander à sa mère :

« Pourquoi y’ s’ferme les yeux m’man ? »

– Parce qu’il est triste, inventait Conscience Cupidon.
– Parce qu’yé lâche, s’opposait Conscience Maman.

Ils me lançaient des boules blanches de la mer. Me tirant chacun de leurs côtés, sous l’eau et sur le ciel. « Ouvre tes yeux et pleure en homme ! » me hurlaient-ils. « Ouvre tes yeux et pleure en homme ». En harmonie, à l’unisson. Décaler et en canon, puis syncopé en gamme mineure. Et…

« Ça suffit ! »

J’avais les yeux ouverts. Sèches comme le sable où il n’y avait pas de plage. Les gens me regardaient, mon père et ma mère étaient assis aux premiers sièges en avant, présents pour leurs images. Maria était couchée dans une boîte, un sourire modelé aux lèvres. Elle avait presque l’air heureux. L’éternel bonheur ! Le paradis, les anges, la musique, les harpes et le doux Jésus sur la croix. Les parfaits !

C’était mon devoir d’être triste, mais je ne l’étais pas. C’était Cupidon qui le disait, mais je voulais m’appuyer sur autre chose que le néant. Ça me fatiguait tout ça.

Je repartis m’asseoir et resta sage à écouter le curé. Je fermai les yeux et un enfant tortue demanda à sa mère :

« Pourquoi y pleure pas m’man ? »

dimanche 9 janvier 2011

Papa noël

Dans ce monde, tout est expansion et rétrécissement. On croît pour une première partie de la vie, multipliant les dents, les cheveux, les pieds et les pouces ; jusqu’au jour où tout retombe, jusqu’aux entrailles qui redeviennent poussière pour ensuite revenir au néant. Le tout et le vide de l’être que celui-ci désire toujours autant, mais personne ne souhaite les atteindre réellement. Disons que ce sont plutôt deux directions ; on se dirige vers l’une pour ne pas atteindre l’autre et quand nous y sommes trop près, pris de vertige, nous courrons alors dans le sens opposé. C’est ce qui me foutait la trouille.

Voilà deux semaines que je fréquentais Martine et nous ne faisions que nous agrandir, et cela à une vitesse phénoménale. Je voulais nous arrêter de croître, par peur de retomber, mais l’attachement se faisait de plus en plus fort. Même le « mais », cette particule d’équilibre ne suffisait pas à freiner suffisamment notre élan. Mais si nous continuions malgré nous à nous développer, je savais bien que c’était ce même obstacle qui allait nous rétrécir.

Il s’appelait Tommy. Le petit Tommy. Son petit Tommy.
Cet ingrat, ce gosse mal foutu. Ce morveux.
C’était ce matin même que je devais le rencontrer. Mardi matin. Il avait congé pour le temps des fêtes et Martine jugea que c’était le moment idéal. Je ne savais pas d’où elle avait sortit cette conclusion, car à mon arrivé, le petit piqua une crise. Elle tenta de le calmer, mais rien à faire. Je dû retourner chez moi.

Je pensais à son sourire. Il souriait lorsque j’étais partit. Peut-être était-ce mon imagination, mais il me semblait bien avoir vu ce rictus cruel et sadique sur ses lèvres. Mais bon ! Je ne devais pas m’en faire car il allait certainement se résoudre, un jour, à avoir un beau-père comme moi. Peut-être même qu’il s’en réjouira ! De toute façon il n’en avait pas le ch…

Je freinai d’un coup sec.

Une énorme boule rouge s’était jeté sur mon pare-choc et ne guettant pas la route, je l’avais percutée de plein fouet ! Mon cœur se resserrait. Cette boule rouge était sans doute un homme, les animaux aux poils rouges étant très rare par chez nous et à ce temps-ci de l’année je craignais bien ce que c’était, car en sortant de ma voiture, je le voyais inerte au sol.

J’avais tué le père noël.

Je restai figé un instant et je considérai l’ampleur de la situation. Bien sûr que ce n’était pas le vrai. Il travaillait probablement au centre d’achats à quelques rues d’ici et se dirigeait là-bas pour le boulot, mais un enfant, lui, ne pourrait pas voir la différence et c’était là que commençait le rétrécissement. Et si jamais cette histoire allait aux oreilles du petit Tommy ? Ou pire encore ! À ses yeux ! Car bien évidemment, les médias allaient couvrir l’affaire et j’étais presque certain que ce morveux allait finir par le savoir et ce serait là, la fin de tout le reste.

Martine !!!

J'étais perdu, déboussolé, abandonné ! Je devais faire quelque chose ! Mais que faire ?

« Minable ! Abruti ! Mais qu’as-tu fait malheureux ! » m'écriai-je à moi-même.

Je m’approchai donc du corps inerte. Figé encore. Et c’est là que je crus, un instant, voir dans le visage du papa noël, un sourire. Un sourire qui me fixait comme ça, tout bonnement. Que me voulait-il celui-là ? Pourquoi souriait-il comme un idiot ? En fait, non. Pas comme un idiot, mais plutôt comme un farceur. Oui ! Ce sourire machiavélique, je le connaissais ! C’était celui de Tommy. Celui qui disait : « Elle est à moi et juste à moi et pour toujours ». Ce sourire qui me réduisait en valeur nul. J’entendais ses cris et ses larmes et son rire subtil. Espèce de… !

J’ouvrai la portière et j’entrai de nouveau dans la voiture. Je démarrai, reculai, puis avançai, puis reculai à nouveau. Je l’écrasai, je l’écrabouillai jusqu’à le défigurer, l’effacer, le diminuer. Mais en sortant de ma voiture pour constater les dégâts, le sourire était encore là. Pas aussi évident certes, mais il gardait ce rictus, une trace de ce sarcasme.

Je tentai d’abord avec mes mains de modeler son visage, mais le rictus réapparaissait sans cesse sur son visage. Simplement là, à me regarder m’acharner.

« Arrête de sourire espèce d’idiot ! m’écriai-je. Mais arrête ! »

C’est alors que je décidai de le lui faire payer. J’allais le faire disparaître ce sarcasme ! Je sortis mon canif de mes poches. Je restai hésitant, mais c’était la seule façon de le faire disparaître. Je le pris, la main tremblante, et m’approchai du visage. Au début, mon cœur battait trop rapidement et je lui piquai le visage de travers. Allant des yeux aux narines et des joues aux lèvres. Arrivé à destination ! Enfin ! Je lui dessinai sur le visage un air triste, c’est-à-dire une ligne pointant vers le bas de chaque côté du visage. Comme dans Batman. Le travail n’était pas très propre certes, mais je fus satisfait du résultat.

Je triomphais !

Enfin, qu’un court instant. Bien que la pulsion fût tout à fait humaine, elle n’était pas vraiment morale. D’abord, j’avais écrasé le symbole, ce modèle pour les enfants et j’étais toujours à risque qu’un enfant sorte de chez lui et aperçoive le corps ! L’accident n’allait pas passé pour un accident banal, mais pour crime contre l’humanité ! Même le meurtre ordinaire, on pouvait me le pardonner, mais ce crime… Personne n’a jamais pardonné Hitler ou Oussama, alors qui serait prêt à pardonner une ordure qui a tué le père noël dans une petite rue de banlieue ?

Je devais me débarrasser du costume. Il n’y avait pas d’autre solution, sinon j’allais perdre à jamais ma belle Martine. Et le corps, on s’en fichait au fond. Au point où j’en étais, j’allais probablement me faire prendre de toute façon !

Je commençai donc à le débarrasser de son costume. Ce n’était pas évident. Vous savez comment c’est difficile de soulever un cadavre ? Alors, imaginez celui du père noël !

C’est une fois le travail terminé qu’une voisine qui sortait ses poubelles, se mit à hurler en réaction à la scène qui se tenait devant elle. Bien entendu, je ne m’effrayai pas, j’avais même un léger sourire, puisque qu’au fond de moi, je savais qu’elle allait me pardonner un jour ! Les autorités arrivèrent assez rapidement, je ne m’obstinai point. J’imaginais déjà, mon retour dans les bras de Martine dans quelques dizaines d’années. Le retour en société ne sera pas facile puisque mon rétrécissement aurait été une pente assez abrupte, mais l’expansion n’en serait que mémorable par la suite.

Je triomphais tout de même !

Enfin, qu’un court instant. Puisque peu après l’arrivé des policiers, l’enquêteur fit son apparition. C’est dans un rictus qu’il regarda le cadavre et s’écria :

« Je vous en pris ! Il y a des enfants qui regardent. Remettez-lui son costume ! »

Et c’était ce rictus qu’il avait. Ce sourire. Quel salaud !