samedi 20 février 2010

Pluie de septembre

Ils étaient sous la pluie. Lui, un homme bien ordinaire, dépassé un peu la trentaine, avec son parapluie. Elle, elle aurait pu être ordinaire aussi, mais sa jeunesse et son sourire derrière le mauvais temps, la rendait particulière. Elle n’avait pas beaucoup de vêtements et devait avoir froid se disait l’homme, mais elle semblait bien malgré tout. Sans parapluie, elle restait là, se contentait de peu et souriait.

L’homme hésitait de lui proposer son abri. Peut-être qu’elle préférait rester sous l'averse simplement, car mise à part ce sourire et ces gouttes, elle n’avait pas grand chose. Il ne voudrait pas que son parapluie lui arrache son bonheur. D’autant plus qu’il était si ordinaire, noir avec un manche métallique, et des mains froides et abîmés par le temps tout autant, si ce n’est pas plus, monotone.

Alors, il restait là à la regarder, elle qui ne faisait rien de particulier, vraiment. Ce n’était pas l’action qu’on voit à la télévision, mais ses péripéties l’intriguaient quand même. Elle ne bougeait pas, mais elle vivait. Elle ne s'agitait par le corps, il y avait autre chose. C’était des vibrations, une clarté, comme une étoile. Une lumière qui se laisserait filer par le vent, mais vivre comme un arbre, se laisser vivre par la pluie, sans bouger, enraciné. L'eau caressait ses cheveux, sa peau et imbibait ses vêtements et ses lèvres. Elle se laissait se gonfler de vie, gonfler comme une éponge, éclater la pluie et la vie dans ses veines, sous ses pores de peau, l’épiderme, ses feuilles à fleur de peau, chlorophylle dans ses yeux verts de brume, vert-gris.

L’homme se demandait si ce n’était pas un rêve. Elle était trop belle et trop vivante pour exister, mais lorsqu’il vit qu’elle tremblait, il ne se posait plus la question. Elle avait froid pour vrai, elle se baignait pour vrai et se trempait et souriait, malgré tout, réellement. Il voudrait bien lui proposer un toit, des vêtements, des mains pour la réchauffer, mais elle semblait si heureuse, sous l'orage. et lui, si uniforme, ses vêtements si sales et ses mains si froides, si laides.

Il souffrait à la regarder, souffrait d’amour et de tendresse. Il voudrait bien lui offrir une caresse d’étoile, d’eau fraîche, de vie et d’air. Mais encore une fois, il était trop normal. Alors, il l’a regardait. Il l'observait dans son nuage, vivre sous les gouttes, sous les ombres du soleil. Puis, il crut la voir verser une larme. L’homme eut un coup au cœur. Était-ce le froid ou la peine qui la faisait pleurer? Ça ne pouvait être la peine, car elle avait encore ce dessin au visage. Ça ne pouvait alors n’être que le froid...

Malgré ses mains froides, ses vêtements sales, son parapluie abîmé, sa tendresse maladroite, ses caresses vieillies par le temps, refroidies par les cheveux gris, il alla la rejoindre. Plus il s’approchait et plus elle était belle, plus elle tremblait, plus elle vibrait. Il ne pouvait s’empêcher de pleurer, mais la pluie cachera ses yeux rouges, il mettra cela sur la faute du froid de l’automne. Il marchait sur les feuilles mortes trempées par les restants du ciel qui ruisselaient, les larmes de leurs arbres qui avaient vu leurs enfants mourir. Il ne restait maintenant, plus que la distance d’un parasole qui les séparait, à une caresse d’elle, il s’arrêta…

Il ne savait pas si elle le voyait, elle était si absorbée par la musique de son monde, le temps et les rêves. Mais lui, il l’a voyait, de si près. Il voudrait l’embrasser, toucher ses lèvres gonflées. Il voudrait sentir ses cheveux, toucher son capillaire gonflé tout autant. Il voudrait toucher ses mains, se lier à la sienne. Il voudrait…

Une voix à quelques distances cria son nom. Elle s’appelait Jasmine. Elle avait un si jolie nom se disait l’homme. Elle se retourna, et courut vers un autre homme, plus jeune, plus beau, plus vivant, multicolore. Ils s’embrassèrent les étoiles sous la pluie du mois de septembre. Lui, pouvait sentir ses cheveux, toucher sa main, ses lèvres, ses mots.

L’homme au parapluie repartit vers la direction d’où il venait. Son vielle abri, ses vêtements décolorés, ses cheveux gris et ses mains, ses yeux froids par le temps. Ses feuilles mortes, ses fruits trop mures, pleurés par leurs mères.

3 commentaires:

  1. Si tu pensais à moi en l'écrivant, je suis vraiment très très très touchée Mario. Univers magnifique, fragile, poétique et touchant. Wow. Et quelle fin triste! Tu as une magnifique sensibilité Mario et j'admire beaucoup ça chez toi. Tu écris tellement bien. Laisse-toi guider par l'inspiration et continue de nous partager tes mots. Ça fait du bien. Je t'aime xxxxxxxxxx

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  2. Ça me fait plaisir que tu aies aimés ! Mademoiselle J, pour Julie ou pour Jasmine ;-).

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  3. Ce serait cool que tu fasses un texte avec un minimum de crédibilité ou de sens. Tu es agréable à lire mais je n'ai jamais aimé la fiction.

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